CHAPITRE XI
EPILOGUE
Aigus 1 reste immobile entre les deux tables d'opération. A sa droite, Vitray, à sa gauche, Elgern. Les deux hommes dorment toujours. Le robot a exécuté minutieusement les consignes et ne connaît pas l'inquiétude. Que le transfert ait réussi ou ait échoué, ne changera rien à son impassibilité.
Il obéit scrupuleusement à ses maîtres et uniquement à eux, mais n'éprouve aucun sentiment à leur égard. Le corps de Vitray est le premier à avoir un tressaillement. II va sortir de la narcose avant Elgern... Oui, il ouvre les yeux. Un instant, il reste immobile, étonné de se retrouver dans l'aviso.
— Aigus 1, que s'est-il passé?
— Je viens de procéder au transfert.
Vitray se retourne sur sa couche et aperçoit à côté de lui, sur l'autre table, le corps d'Elgern.
— Le transfert, tu dis ? Alors mon cerveau ne contient plus deux personnalités ?
— Si tout s'est bien passé,
Lentement, Vitray se redresse. Elgern vient de tressaillir à son tour. Elgern est nu et lui, Vitray, habillé. Evidemment, dans les poches de son justaucorps, il cherche un paquet de cigarettes et en allume une. Une bouffée..., deux... La fumée lui fait du bien.
— J'ai l'impression d'avoir la tête un peu vide... Je me sens plus léger..., amoindri dans une certaine mesure.
Soudain, Elgern demande :
— Comment va, Vitray ?
Lui ne peut pas bouger à cause de la terrible blessure de sa colonne vertébrale.
— Je vais très bien, répond le Français, et Aigus 1 reste silencieux.
Elgern constate :
— Aigus est réglé sur tes ondes biologiques et tes impulsions mentales... Je suis désormais sans pouvoir sur lui.
En s'approchant, Vitray est tout désemparé.
— Comment allons-nous faire ?
— Changer la bande tout simplement... Ça te concerne... Mais tu peux garder le contrôle de l'aviso, du vaisseau et des robots si tu le désires.
— Et j'en ferais quoi ?
Elgern sourit :
— Enlève la bande de conditionnement de l'ordinateur... En bonne logique, je suis le plus apte à. me servir de tout cela.
— Où est Adrun ?
— Toujours enfermé dans la soute 8.
— Je vais t'expliquer...
Elgem l'interrompt.
— Inutile. Il faut maintenant rejoindre Délénia le plus vite possible et me ramener des chirurgiens pour m'opérer... La réussite de ce transfert est une chose prodigieuse, je suis content d'y être parvenu.
— Comment pourrai-je rejoindre Délénia ?
— Par le truchement de la directrice de l'Hôtel Impérial de Talima. Tu pourras te rendre là-bas dans une navette spatiale. Tu auras un parchemin au sceau de l'Empereur pour les autorités militaires, et tu garderas le mien réglé sur tes ondes biologiques jusqu'à ma guérison.
Vitray se dirige vers l'ordinateur et sort la bande de conditionnement ; il l'apporte à Elgern. Il faut juste quelques instants à ce dernier pour la modifier puis il la tend à son ami.
— Va la remettre en place.
C'en est fini pour Vitray de sa toute-puissance.
— Je m'habituais à commander aux machines et aux vaisseaux, dit-il.
— Tu en auras d'autres qui t'appartiendront... Voici le sceau de l'Empereur pour les autorités de Talima... Il te suffira de le montrer, on t'obéira immédiatement. Délénia connaît les chirurgiens dont j'ai besoin.